Augenblick, le cinéma allemand d’avant et d'aujourd'hui

En 2023, le festival de cinéma allemand Augenblick a réuni 70.000 cinéphiles sur deux semaines, soit 14% de fréquentation supplémentaire par rapport à l’année précédente, a indiqué sa directrice artistique Sadia Robein. Augenblick, ce sont 46 lieux de projection et 1.257 séances en Alsace, à Nancy et Sarreguemines. Porté par l’association Le Récit et soutenu grâce à un contrat triennal avec l’Eurométropole de Strasbourg, ce festival s’étend donc et gagne en popularité année après année. Sa 20ème édition débute ce lundi 5 et se poursuit jusqu’au 22 novembre, un anniversaire qui continue de puiser dans une veine historique, mais toujours provocatrice et engagée.

Légende du cinéma, la berlinoise Marlene Dietrich sera à l’honneur ainsi que l’autrichien Axel Corti et la sarrebruckoise Ingrid Caven, l’occasion de (re)découvrir des films d’anthologie en version remasterisée sur grand écran. Pour les organisateurs, il était important de célébrer l’interprète de Lili Marleen, icône affirmée, transgressive et opposée aux simplifications idéologiques, à travers ses trois films les plus célèbres.   

La trilogie d’Axel Corti, Welcome in Vienna, s’inscrit d’ailleurs dans la lignée du focus dédié à Dietrich, puisque les deux réalisateurs de L’Ange Bleu (1930, Josef von Sternberg) et de La Scandaleuse de Berlin (1948, Bill Wilder), avant d’être des pontes du cinéma hollywoodien, avaient fui l’antisémitisme d’Europe centrale. Ce triptyque raconte la réalité de la migration des Juifs autrichiens à travers l’Europe, puis leur arrivée aux États-Unis vus comme une terre promise, et, enfin, le retour à Vienne où le désenchantement opère, dans une ville où tout est à reconstruire. 

Enfin, la comédienne et chanteuse Ingrid Caven brillera dans trois longs-métrages, dont deux de R.W. Fassbinder "(Maman Küsters s’en va au ciel", 1975 et "L’Année des Treize lunes", 1978). Egérie de la Nouvelle Vague aussi bien française qu’allemande, Ingrid Caven sortira son nouvel album Heidschi Bumbeidschi – "16 moments de ma vie" en fin d’année.

Pour l’équipe organisatrice, le cinéma questionne, met en perspective et en lumière des sujets de société, comme le rapport à la misère, à l’homosexualité et à la vieillesse, notamment à travers la carte blanche accordée au philosophe et sociologue Didier Eribon (auteur de “Retour à Reims”) ou la section “Berlin, creuset des luttes des minorités sexuelles et de genre”. Entre activisme, parcours de vie et drame, Augenblick entend ouvrir le débat sur la place des minorités dans la société occidentale, des années 1970 à nos jours. 

À voir : Queer Exile Berlin (2023, DE), Le Cercle (2014, CH), Deux (FR, 2019)  

De multiples animations sont également à l’affiche parmi lesquelles un apéro-conférence sur la place des femmes réalisatrices sur internet et Wikipédia animé par l’association les Sans Pages et le collectif 50/50, le 20 novembre au Cosmos à Strasbourg. Trois sessions de mix auront lieu pendant le festival à la Graffeteria, au Quartier Gare de Strasbourg. Celle d’Iyas al Shouli proposera une techno inspirée de la communauté gay des années 1960-70. 

Les organisateurs d’Augenblick misent, en parallèle, sur le réseautage et la formation, aussi bien à destination des jeunes producteurs européens que des lycéens. Le festival a mis en place plusieurs jurys (jeunes producteurs, lycéens), des journées d’études de cas pour producteurs et auteurs comme une Académie du court-métrage. Un concours de critique de film est aussi ouvert aux 15-20 ans et permettra aux lauréats d’assister à la Berlinale 2025.

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